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29 juillet 2016 5 29 /07 /juillet /2016 08:15
DAN TEPFER : ALGORITHMES, PIANO ACOUSTIQUE & IMPROVISATION

Après le concert du Festival de Radio France & Montpellier, les réflexions du chroniqueur, et les précisions du pianiste apportées lors d'un entretien téléphonique et transatlantique.

À l'occasion de la Carte blanche que lui offrait le festival de Radio France & Montpellier Occitanie, Dan Tepfer a choisi de poursuivre ses expérimentations personnelles autour du piano acoustique à interface numérique, de la programmation et de l'improvisation.

Au cours du concert, le pianiste a fait le va-et-vient entre le piano de concert (Steinway modèle D) et le Disklavier Yamaha, piano à queue d'une taille plus modeste, équipé d'un dispositif qui lui permet tout à la fois d'enregistrer la musique jouée par un pianiste, de la restituer instrumentalement mais aussi, via une interface numérique pilotée par ordinateur, d'exécuter une musique programmée ou, dans le cas qui nous intéresse, de réagir à la musique jouée sur le clavier par le pianiste et de générer d'autres notes, d'autres rythmes, d'autres accords.

Dan Tepfer, de culture scientifique de haut niveau, pratique la programmation depuis l'adolescence. Et il conçoit et programme lui même des algorithmes qui font réagir le piano à ses improvisations selon des choix dûment codifiés par ses soins. Pour éclairer le public du concert donné le 19 juillet dans l'imposant Amphithéâtre du Domaine d'O, il a commencé en jouant, sur le grand piano de concert, la 3ème Variation Goldberg de Bach. Puis, comme il l'a fait régulièrement en concert, et sur disque, il a improvisé à partir de la contrainte que s'était fixées Bach pour cette variation : celle du canon à l'unisson, qui consiste à répéter en décalage de temps et de registre les notes jouées dans la phrase initiale, et de poursuive ainsi le discours en suivant la même règle, ce qui entraîne vers des espaces de complexité dont Bach se délectait. Il a ensuite expliqué au public qu'il allait, sur le Disklavier et en utilisant un algorithme élaboré par ses soins selon le même principe, improviser sur All The Things You Are : et le piano, piloté par l'ordinateur et cet algorithme, ajoute à son improvisation des notes, phrases et rythmes obéissant à cette règle, et suscitées par le jeu de Dan Tepfer au clavier. Le résultat est vertigineux, et reste totalement musical, car c'est le musicien-improvisateur qui fournit la matière, et continue d'improviser en tenant compte de ce que génère le programme.

DAN TEPFER : ALGORITHMES, PIANO ACOUSTIQUE & IMPROVISATION

Pour une série de duos avec ses partenaires (la chanteuse Claudia Solal, le contrebassiste François Moutin, le batteur Arthur Hnatek), il va chaque fois élaborer un algorithme propre à engendrer, à partir de son jeu de piano, la matière d'un dialogue avec l'invité(e). La folle effervescence rythmique du programme destiné au duo avec le batteur va entraîner les deux musiciens dans une complexité ludique réjouissante, où l'extrême concentration de chacun participe de la jubilation commune.

Quand on demande à Dan Tepfer si écrire un algorithme, dans ce contexte, c'est composer, il répond par l'affirmative, mais en précisant que l'algorithme est un procédé, un cadre, comme dans la composition musicale peuvent l'être une choix de forme ou de règles. Si l'on demande au pianiste si l'algorithme écrit par ses soins laisse place à l'aléatoire, il dit que ce n'est pas le cas, en tout cas pour l'instant. Dans le dispositif cependant existe une petite part d'aléatoire, mais qui n'est pas codifiée comme telle, avec l'intention d'introduire l'aléa comme une élément conscient du code. Et lorsque l'on lui demande si l'algorithme conçu par ses soins devient comme un partenaire de jeu, il répond « oui »,sans hésiter.

Quand on évoque la délicate question de savoir si une contrainte, ou un faisceau de contraintes, une règle, stimulent la créativité, sa réponse est aussi nettement positive. Et il cite l'influence qu'a eue sur sa réflexion une pièce de György Ligeti, Musica Ricercata , œuvre pour piano qui utilise d'abord dans un premier mouvement deux notes, dont l'une est déclinée dans d'infinies variations de dynamique, de timbre, de couleur.... Puis dans le suivant trois notes, et ainsi de suite. C'est par exemple le défi que s'impose Dan Tepfer, en improvisant après chacune des Variations Golberg, d'en reprendre les contraintes dans un langage différent, le sien en l'occurrence. Dan Tepfer se dit que l'on eut aller encore beaucoup plus loin dans la démarche entreprise. Le concert de Montpellier, avec différents partenaires, et en public, marque une nouvelle étape, et ces premiers résultats l'encouragent à développer encore ses recherches ; il pointe cependant la limite du conceptuel, et l'importance du facteur humain (compositeur-programmateur-improvisateur) ; mais il reconnaît aussi que, par cette démarche, il parvient à produire une musique à laquelle il n'aurait pas accédé par d'autres voies, et le but recherché est atteint : produire de la joie.

Dans le prochain disque, d'ores et déjà enregistré, avec Lee Konitz, et qui devrait paraître dans les mois qui viennent sous un grand label, il y a une plage qui utilise le disklavier et un algorithme conçu par Dan ; et le pianiste dit que Konitz s'en est trouvé inspiré, entraîné vers un ailleurs insoupçonné. Dan Tepfer prévoit, en 2017, de mettre chaque mois en ligne une vidéo illustrant l'évolution de son travail, avant de publier un nouveau disque qui sera le résultat de ce parcours presque initiatique.

Les Dernières Nouvelles du Jazz suivront cette progression, avec un ou plusieurs entretiens en compagnie de Dan Tepfer, pour illustrer et éclairer ce qui s'annonce, d'ores et déjà, comme passionnant.

Xavier Prévost

Plus d'informations , en anglais, sur le site The Culture Crush :

http://www.theculturecrush.com/acoustic-informatics

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28 juillet 2016 4 28 /07 /juillet /2016 14:29
Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Samedi 23 juillet, Mario Canonge-Michel Zenino 5tet ©David Abécassis

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Dix jours écoulés depuis le premier concert de jazz du Festival de Radio France & Montpellier Occitanie (nouvelle appellation contrôlée depuis la fusion du Languedoc Roussillon avec Midi Pyrénées). Dix jours de concerts à 22h dans le très grand Amphithéâtre du Domaine d'O, et un bilan globalement plus que positif : très beaux concerts, grande diversité, et belle fréquentation du public, lequel donne toute les apparences de la satisfaction.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Début dans l'euphorie avec le duo André Minvielle / Jean-Marie Machado : d'abord solo de l'un, puis de l'autre, et ensuite duo autour de Bobby Lapointe (un projet commun qu'ils ont donné de nombreuses fois), mais aussi du répertoire du chanteur-scatteur-vocalchimiste, avec passage par Mingus et Monk. Quelques beaux moments de folie douce.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Puis, dans le cadre du thème général du festival, qui est cette année « Le Voyage d'Orient », présence du « Golan Sextet » du contrebassiste Hubert Dupont. Avec un violoniste tunisien, une flûtiste d'origine syrienne, un percussionniste et un joueur de oud originaires de Palestine, un beau croisement des musiques de Méditerranée orientale avec le jazz, représenté par le contrebassiste, et Matthieu Donarier qui officiait à la clarinette métal. Belle réussite, avec des solistes exceptionnels, et certains arrangements très jazz sur ce terreau d'orient.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Le lendemain, « Carte blanche » au pianiste Dan Tepfer. Il a invité des artistes auxquels le lient d'anciennes connivences (la chanteuse Claudia Solal, le contrebassiste François Moutin) et un batteur avec lequel il s'est découvert plus récemment des affinités : Arthur Hnatek. Sur scène deux pianos : un grand Steinway, et un plus petit Yamaha, modèle Disklavier, à interface midi. Dan Tepfer, de culture scientifique de haut niveau, pratique depuis sa jeunesse la programmation informatique. Et il écrit sur son ordinateur, pour ce dispositif, des algorithmes conçus pour faire réagir la partie active et autonome de l'instrument à ce qu'il joue lui-même au clavier. Et il jouera successivement du piano de concert et du piano à interface. Avec ce dernier, il fera trois duos, ayant chaque fois créé un programme spécifique pour ses interlocuteurs et son interlocutrice : fécond et passionnant. La musique sans assistance des machines aura aussi sa place, avec un solo sur et autour de Bach (3ème Variation Goldberg) ; un très beau duo avec la chanteuse, sur Lush Life ; et un trio très effervescent avec le bassiste et le batteur. Le tout conclu par un quartette autour du Disklavier, sur une fractale conçue par Dan Tepfer, pour la circonstance, et dont la représentation visuelle évolutive s'affichait sur un écran géant à mesure que la musique se développe. Un article plus détaillé sur l'aspect informatique et musique viendra bientôt sur une autre page du blog, et sera développé dans les mois qui viennent par un entretien avec l'artiste, et un work in progress en vidéo.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Le jour d'après ce fut un autre pianiste, Michael Wollny, en trio : beau mélange d'atmosphères sombres empruntées au répertoire « classique » (Guillaume de Machault, Paul Hindemith, Alban Berg), très transformé, et de débauche d'énergie virtuose, avec une interaction impressionnante entre les membres du trio.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Puis ce sera le saxophoniste portoricain Miguel Zenon, avec son quartette régulier, où brille en particulier le pianiste vénézuélien Luis Perdomo. Richesse rythmique, belles improvisations mélodiques, constructions savantes ou tourneries entêtantes : la musique est de haut vol, le répertoire est celui d'un disque à venir, début 2017, qui devrait s'intituler « Tipico ».

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

La soirée suivante, à nouveau inspirée par la thématique orientale du festival, accueillait le groupe « Ethics » du contrebassiste Michel Benita, avec Mieko Miyazaki au koto, Matthieu Michel au bugle, Manu Codjia à la guitare, et Philippe « Pipon » Garcia à la batterie. Musique qui naît dans le recueillement pour ensuite exploser dans l'intensité expressive : grande réussite musicale, et gros succès public.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

©David Abécassis

La semaine, commencée le dimanche 17, s'achève le samedi 23 avec le quintette qui associe le pianiste Mario Canonge et le contrebassiste Michel Zenino. L'esprit est celui du jazz des années 60, celui qui s'épanouissait sous étiquette Blue Note avec Herbie Hancock, Freddie Hubbard, Joe Henderson.... Très bon groupe, très homogène, avec un batteur guadeloupéen, un trompettiste américain, et un saxophoniste cubain. Effervescence maximale dans l'Amphithéâtre, et confirmation que Mario Canonge est un grand pianiste de jazz.

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Le dimanche 24 juillet, le jazz fait relâche pour cause de Carl Orff. Contrairement à Woody Allen, je n'ai pas envie d'envahir la Pologne quand j'écoute Wagner. En revanche, les Carmina Burana auraient une fâcheuse tendance à réveiller en moi des instincts belliqueux. Donc, prudemment, je me suis abstenu....

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

La reprise du jazz, le 25 juillet, se fit en beauté, avec le trio « Fox » : Pierre Perchaud, Nicolas Moreaux, et à la batterie, remplaçant Jorg Rossy qui participait au CD, Karl Jannuska. Très belle musique, d'apparence intimiste, et pourtant porteuse d'une flamme intense, attisée par le drumming raffiné et pulsatoire du canadien. Lyrisme superlatif du guitariste, et formidable drive du contrebassiste, présent à chaque instant dans le trilogue : vraiment très réussi.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

La conclusion, le 26 juillet, se fit en compagnie du groupe Pucinella : déjanté, fédérateur et efficace, avec une mention spéciale pour le saxophoniste-flûtiste Ferdinand Doumerc, décidément porteur d'une incroyable énergie, combinée avec une incontestable virtuosité.

Festival de Radio France & Montpellier Occitanie : bilan jazz d'un festival

Au fil des jours, chaque soir à 20h30, la pinède du Domaine d'O accueillait un avant-concert avec des groupes de la région, d'une belle tenue musicale. Le plus originale et le plus abouti fut peut-être, le premier soir, le duo « Connie & Blyde », qui associe la chanteuse Caroline Sentis au violoncelliste Bruno Ducret. Et peut-être aussi, l'avant dernier soir, la renaissance du groupe vocal Elull Noomi, qui en 2008 avait eu les honneurs de la grande scène.... mais se trouvait fort heureux, pour sa reprise, d'avoir fait escale à la pinède.

Au total un bilan réjouissant, sur le plan de la qualité artistique et de la diversité du programme, lequel fut conçu par Pascal Rozat pour l'Amphithéâtre, et par Serge Lazarevitch pour la pinède.

Xavier Prévost

Les concerts sont en réécoute sur le site de France Musique :

http://www.francemusique.fr/emission/jazz-ete/2016-ete

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20 juillet 2016 3 20 /07 /juillet /2016 07:45
@jmgelin
@jmgelin

Steve Coleman (Saxophone alto), Jonathan Finlayson (Trompette), Sean Rickman (Batterie), Anthony Tidd (Basse), Miles Okazaki (Guitare)

C'etait hier soir. Paris. Chaleur de boeuf. Une heure d'attente dans la file qui s'étire sur la rue des petites Ecuries. Les femmes s'éventent avec des flyers et tout le monde prend son mal en patience.

Quelques jours plus tôt, Steve Coleman avait donné un concert privé quelque part dans Paris mais je n'avais malheureusement pas pu y aller.

Steve entre sur scène avec son éternelle casquette à l'envers. Depuis quelques temps déjà il orne le bout de son nez de petites lunettes fines.

Les 5 éléments sont sur scène et démarrent assez mollement le concert. Coleman ne trouve pas vraiment son Son. On se dit que la soirée risque d'être longue dans cette salle bourrée à craquer.

Et puis au 3ème morceau, le déclic se fait et le groupe face à la mollesse de la salle monte d'un cran. Et alors le groove s'installe. Coleman s'enflamme.

Et tout à coup la mathématique savante de Five Elements, ce langage qui lui est propre s'éclaire et emballe tout sur son passage.

Steve Coleman est décidément un grand, un immense. Un qui a révolutionné le langage du jazz.

Une grande et belle soirée au New-Morning où la chaleur se faisait soudainement très très légère.....

JM Gelin

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18 juillet 2016 1 18 /07 /juillet /2016 00:06
JAZZ à JUNAS aux ARÈNES de VAUVERT

Le festival gardois, bien connu pour la qualité sélective de sa programmation, donnait cette année ses trois premières soirées à Vauvert. La soirée du 16 juillet, parrainée par la Spedidam, offrait trois visages et trois générations de la scène hexagonale.

JAZZ à JUNAS aux ARÈNES de VAUVERT

Juilien Touéry (piano), Ivan Gélugne (contrebasse), Julien Loutelier (batterie)

Le quartette d'Émile Parisien était prévu en ouverture à 21h, mais le saxophoniste, qui jouait la veille avec Airelle Besson, Anne Paceo, Vincent Peirani, Thomas Enhco et quelques autres français au festival d'Istanbul, s'est trouvé bloqué en Turquie, dont les aéroports ont fermé suite au coup d'état avorté. C'est donc en trio que ses partenaires ont joué, avec le répertoire du groupe adapté à cette nouvelle configuration. Avec audace, il nous ont fait profiter de leur belle connivence, et après une introduction hardie en forme de paysage sonore, ont exploré quelques voies du trio, depuis l'esprit de Paul Bley dans les années soixante jusqu'aux choix de leur génération. Ce fut vivant, tendu, plein de surprises et d'aspérités, et aussi très lyrique : une belle découvert en somme, qui transforme en bonheur la déception de n'avoir pas eu le groupe au complet.

JAZZ à JUNAS aux ARÈNES de VAUVERT

L'après midi, sous le soleil, les gradins attendent un public qui ne viendra qu'avec la nuit

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Éric Séva (saxophones baryton & soprano), Daniel Zimmermann (trombone), Bruno Schorp (contrebasse), Matthieu Chazarenc (batterie)

Puis ce fut le groupe « Nomade Sonore » d'Éric Séva : lyrisme également, bâti sur des mélodies mélancoliques dont l'apparente simplicité s'exaltait dans des développements très subtils. Chaleur et émotion étaient au rendez-vous, servies par la belle cohésion de ce groupe très rôdé, saisi au vol d'une tournée d'été de douze dates (privilège rare pour le jazz hexagonal en ces temps de pénurie....). Fougue virtuose, au service de la musicalité, chez les deux souffleurs, avec une mention particulière à Daniel Zimmermann pour son talent à mettre en relief, par ses contrepoints, le discours de son partenaire.

JAZZ à JUNAS aux ARÈNES de VAUVERT

Les Arènes ont leurs secrets au détour des coursives

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Richard Galliano (accordéon, accordina), Philip Catherine (guitare), Philippe Aerts (contrebasse), Hans Van Oosterhout (batterie)

Et la soirée trouva sa conclusion avec le « New Musette » de Richard Galliano, magnifié par la présence de Philip Catherine. Le guitariste est décidément un orfèvre qui traverse tous les langages du jazz avec une finesse confondante, faisant chanter son instrument dans tous les idiomes. Lui et ses compères du Nord de l'Europe donnaient à l'homme du Sud une réplique impeccable. Beaucoup de valses, des mélodies accrocheuses et sentimentales, jouées sans mièvrerie mais le cœur simple. Le public ne s'y trompait pas, qui fut conquis. Un solo de l'accordéoniste dans son répertoire fétiche (dont Piazzola), un trio sans guitare et un autre sans accordéon apportèrent la touche de diversité qui vint renforcer encore la joie des auditeurs. Et le fête se conclut par La Javanaise, d'abord en impro très libre, puis à la lettre en chant choral de tout l'auditoire. Le festival reprend le 19 juillet à Junas même ( suivre le lien pour le programme : www.jazzajunas.fr ).

Xavier Prévost

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 16:17
JAZZ À COUCHES : 30ème Édition !

Les Sourdines à l'huile, presque au complet, donnent l'aubade au public avant le concert

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Célébration en fanfare de la trentième édition du festival bourguignon créé en 1987 dans cette commune du vignoble de la Côte chalonnaise qui, depuis peu, développe sa spécificité de bourgogne-côtes-du-couchois.

Ici jazz et vin sont liés de longtemps. Le vibraphoniste Franck Tortiller, et son regretté père, Maurice « Mimi » Tortiller, vigneron et figure musicale de cette région, ont donné âme à ce festival, entourés d'un inépuisable vivier de bénévoles de toutes les générations. Couches a son big band amateur (qui compte trois vignerons), amicalement encadré par les amis musiciens professionnels de Franck Tortiller, le trompettiste Jean Gobinet et le tromboniste Jean-Louis Pommier notamment. La veille de mon arrivée s'est tenue, sous le chapiteau, une battle de big bands où l'orchestre local affrontait le big band Chalon Bourgogne, plus professionnel. Les échos recueillis par votre serviteur attestaient d'une formidable soirée.

JAZZ À COUCHES : 30ème Édition !

Le quintette "Daïda" de Vincent Tortiller

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Le 7 juillet, c'était la soirée américaine, avec James Carter, et en première partie le quintette « Daïda » du batteur Vincent Tortiller, fils de Franck et petit-fils de « Mimi » : le festival de Couches a donc encore un long avenir devant lui. Vincent a été formé dans les conservatoires du sud de Paris, et au CMDL. Il s'est entouré de musiciens de sa génération : un formidable trompettiste, déjà repéré dans le métier, Alexandre Herichon ; un pianiste qui sait prendre des risques, Joran Cariou ; Eddy Leclerc à la guitare et Richard Metairon à la contrebasse qui complètent l'équipe avec talent. Le répertoire, composé par le batteur, le trompettiste et le pianiste, est finement élaboré, vivant, punchy et nuancé. Et deux compositions de Christian Scott, que le groupe s'avoue comme influence, on conclu un set plus que convaincant.

JAZZ À COUCHES : 30ème Édition !

Pendant la balance de James Carter, les éclairagistes grimpent à l'échelle

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Vient ensuite le même soir le saxophoniste James Carter et son Organ trio, qui l'associe à l'organiste Gerard Gibbs et au batteur Alex White. Grove assuré, très soul jazz, autour des thèmes de Django Reinhardt. Comme il le faisait voici 15 ans, le saxophoniste a repris des thèmes du Grand Manouche, mais cette fois dans une approche un peu différente. Sous le titre « Django Unchained »,Il donne des versions décoiffantes (remix dit-il) de Minor Swing, Anouman, Manoir de mes rêves.... en sollicitant ses saxophones (soprano, alto, ténor) jusque dans les registres les plus extrêmes, avec toujours un à propos et un sens musical confondants. C'est vivant, généreux, et très jouissif. Après une ovation verticale du public, une version pépère de Nuages, en rappel, sera le seul moment un peu tiède du concert ; mais le trio avait beaucoup donné.

JAZZ À COUCHES : 30ème Édition !

Franck Tortiller et le "All Stars du 30ème"

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Le lendemain, pour célébrer dignement les 30 éditions du festival, Franck Tortiller avait concocté le « All Stars du 30ème », rassemblant des musiciens qui tous avaient une relation personnelle, et souvent de longue date, avec le festival : Claus Stötter, Jean-Louis Pommier, Éric Séva, François Corneloup, Éric Bijon, Louis Winsberg, Yves Rousseau, Yves Torchinsky et Patrice Héral. La plupart des musiciens avaient apporté des compositions originales, anciennes ou conçues pour la circonstance. Arnaud Merlin, ami de longue date de Franck Tortiller et du festival, et aussi, outre sa qualité de producteur à France Musique, président de l'Association « Jazz en Bourgogne-Franche-Comté », présentait la soirée, introduisant chaque morceau par une anecdote sur le festival soigneusement recueillie auprès de musiciens. Moment intense, avec de belle compositions (F. Corneloup, J.L. Pommier, Yves Rousseau, Franck Tortiller.... , plusieurs signées Louis Winsberg, et une formidable pièce à tiroirs avec étourdissantes interventions percussives et vocales de Patrice Héral. Grand moment de musique intense, festive ou recueillie, ouvert par un très bel arrangement d'Yves Torchinsky sur For Tomorrow de McCoy Tyner. Et en conclusion, à ce tentet, se sont joints des solistes de la région (notamment l'étincellant saxophoniste soprano Aymeric Descharrières), puis est arrivé en renfort le groupe de jazz traditionnel « Les Sourdines à l'huile » pour un Honeysuckle Rose qui restera dans la mémoire festivalière.

Après quoi, public, musiciens et autres chroniqueurs se sont rapprochés du stand des vins pour honorer Bacchus tout en écoutant « Le Peuple étincelle », rassemblé autour de François Corneloup, pour un concert dansant qui se tenait sous le mini-cirque près de la buvette : les danseurs s'en sont donné à cœur-joie, sur des danses traditionnelles ou modernes : ultime effusion festive de la soirée.

Xavier Prévost

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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 09:31
ET HOP ! UNE ESCALE VIENNOISE

Quatre juillet : ce n'est pas aujourd'hui pour moi l'anniversaire de l'indépendance américaine, mais plus prosaïquement le jour d'une petite virée sur les bords du Rhône. Un arrêt, au sortir du TGV à la Part-Dieu, dans un sympathique petit restaurant du 3ème arrondissement lyonnais, pour déjeuner avec une amie de très longue date, puis vingt minutes de TER pour gagner Vienne et son festival. A l'affiche de la soirée : Lisa Simone, puis Randy Weston et son « African Rhythms 5tet »

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Lisa Simone « My World »

Lisa Simone (voix), Hervé Samb (guitare), Reggie Washington (contrebasse & guitare basse), Sonny Troupé (batterie)

Festival « Jazz à Vienne », Théâtre antique, lundi 4 juillet, 20h30

Lisa Simone chante, pour l'essentiel, le répertoire de son récent CD « My World » (SoundSurveyor Music). L'ambiance est changeante : folky, soul, parfois carrément rock si l'on a oublié ce qu'est le rhythm'n'blues. Sa faculté d'entrer en relation avec le public est confondante, qu'elle parle brièvement de sa mère (pour un hommage en forme de reprise : Ain't Got No I got Life ) ou qu'elle évoque la France qui l'a adoptée, et où elle renaît, pour devenir totalement elle-même. C'est touchant, profond, et musicalement jouissif. Le groupe, avec lequel elle est en parfaite empathie, porte sa musique, et la fait étinceler dans des solos éblouissants (Hervé Samb, Sonny Troupé, Reggie Washington). C'est une fête, avec des instants précieux d'émoi et de recueillement. Le public ne s'y est pas trompé, qui lui a réservé un triomphe. Et un triomphe dans le Théâtre antique de Vienne, ça fait du bruit !

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Randy Weston African Rhythms 5tet

Randy Weston (piano), « TK Blue » Talib Kibwe (saxophone alto, flûte), Billy Harper (saxophone ténor), Alex Blake (contrebasse), Neil Clarke (percussions)

Invités :

Cheick Tidiane Seck (pianos électrique et numérique, orgue), Ablaye Cissoko (kora), Mohamed Abozekry (oud)

Festival « Jazz à Vienne », Théâtre antique, lundi 4 juillet, 22h

Randy Weston, 90 printemps en avril dernier, s'est fait rare ces dernières années . C'est donc a priori une joie de l'écouter. Et l'on n'est pas déçu ! Il a choisi, pour ce concert, d'explorer majoritairement le répertoire de son disque de 1991 «« The Spirit of Our Ancestors ». Billy Harper, Talib Kibwe et Alex Blake étaient alors déjà de la partie, aux côtés de Dizzy Gillespie, Pharoah Sanders et quelques autres. Le groupe jouera plusieurs suites : African Cookbook et African Sunrise, et aussi Blue Moses, inspiré par un chant des Gnaouas, un peupe musicien que le pianiste a longuement fréquenté au Maroc. En quintette les échanges sont d'une intensité constante, et la musique se déroule avec fluidité dans un jeu de vertige. Un blues nous fera osciller de l'Afrique à l'Amérique du Peuple noir, et l'on sentira sous les doigts du pianiste son admiration pour Thelonious Monk. Et l'indispensable High Fly, véritable standard du jazz (et de haut vol), viendra conclure la session en quintette. Quand surviennent les invités, avec leurs identités musicales du Mali, du Sénégal et d'Égypte, la cohésion se perd. On passe alors de la circulation fluide des énergies entre musiciens à une sorte de défilé de solos, comme le jazz en produit parfois un peu trop. C'est sensible sur une composition de Cheick Tidiane Fall comme sur Blue Moses. Comme les solistes sont survoltés, le public marche, mais l'amateur chenu, un brin nostalgique, préfère garder le souvenir du quintette ; d'ailleurs, en termes d'horloge, c'étaient les quatre cinquièmes du concert !

Xavier Prévost

Le festival Jazz à Vienne se poursuit jusqu'au 15 juillet

Détails sur www.jazzavienne.com

ET HOP ! UNE ESCALE VIENNOISE
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4 juillet 2016 1 04 /07 /juillet /2016 15:28
TROIS ESCAPADES au PARIS JAZZ FESTIVAL

Nasheet Waits "Equality Quartet" sur la scène du Paris Jazz Festival, au Parc Floral

Parc Floral de Paris, Bois de Vincennes

Daniel Humair Quartet, 19 juin 2016

Nasheet Waits Quartet, 2 juillet 2016

Toni Green & Malted Milk, 3 juillet 2016

L'offre est pléthorique en Ile-de France au début de l'été : festivals ou programmations spéciales dans les clubs (qui profitent du passage des tournées estivales et américaines....), festival Django Reinhardt.... et Paris Jazz Festival au Parc Floral de Paris. Le festival du Bois de Vincennes se tient chaque week-end jusqu'à la fin de juillet. Fidèle à sa réputation d'éclectisme et de diversité, il sait toujours offrir, à côté des indispensables événements « grand public » (ce que justifie la nature du lieu, à la jauge extensible par beau temps -lequel fit hélas, cette année, un peu défaut), des programmes plus pointus. Les programmations sont thématisées chaque week-end, et alternent souvent concerts « sur l'eau » (avec une barge posée sur un bassin) et prestations abritées sur la grande scène de l'Espace Delta. C'est dans ce lieu protégé des intempéries que se déroulaient les concerts ici évoqués.

Daniel Humair d'abord, au sein d'un week-end helvétique, et entouré de la jeune garde du jazz hexagonal. Ce groupe récent (une dizaine de concerts jusqu'alors), rassemble Vincent Lê Quang, Fabrice Matinez et Stéphane Kerecki. L'ambiance est sereine et le batteur, manifestement heureux d'être là, présente ses partenaires avec un chaleureux humour. Les thèmes sont issus des différentes périodes de la carrière du leader (avec une indispensable composition de François Jeanneau), le musique est vive, tendue, et chacun s'y jette avec audace, à mesure de ses talents, lesquels sont pour chacun d'eux considérables. Bref c'est une fête pour la musique, deux jours avant les festivités officielles du 21 juin !

Vient ensuite le week-end états-unien, avec le samedi une perle rare : le quartette "Equality" du batteur Nasheet Waits. Il était venu l'an dernier en sideman dans le groupe du trompettiste Avishai Cohen, ce qui a donné l'envie à Pierrette Devineau, directrice du festival, de l'inviter cette année avec son propre groupe. Le répertoire est signé par chacun des membres : le batteur bien sûr, mais aussi le contrebassiste Mark Helias (magnifique composition !), le saxophoniste alto Darius Jones (un blues torride et dévoyé, avec intro free en solo), et le jeune pianiste cubain Abel Marcel, entendu notamment au côté de David Murray. Il y eut aussi une très belle composition d'Andrew Hill, hommage suscité par l'anniversaire du pianiste-compositeur deux jours plus tôt. Le batteur, très présent par un drumming intense et subtil, joue cependant très collectif. Les solistes sont impressionnants, même si mes oreilles, comme celles de quelques amis présents, étaient irritées par la propension obstinée du saxophoniste à jouer en dessous du diapason dès que l'on allait vers le médium et le bas-médium.... Mark Helias est toujours d'une absolue pertinence, et le pianiste éblouit par la puissance de son jeu, lequel réserve aussi des espaces très nuancés. Bref, et malgré les offenses du saxophoniste au diapason, ce fut un beau moment de musique.

Le lendemain la scène de l'Espace Delta était investie par la chanteuse Toni Green, vocaliste de Memphis qui se produit régulièrement avec un très bon groupe de soul-funk nantais, Malted Milk. Ils s'étaient déjà produits voici deux ans sur cette scène pour les Victoires du jazz. Sebastian Danchin, directeur artistique du festival et spécialiste justement renommé de la musique populaire afro-américaine, est à l'origine de cette programmation. Qu'il en soit remercié ! La chanteuse «fait le show», dans la grande tradition, mais le respect de l'idiome est là, profondément ancré . Soul et funk laisseront aussi place à un blues torride, émaillé de chorus instrumentaux de la plus belle eau. Malgré le crachin obstiné qui pourrait gâcher la fête pour ceux qui n'ont pas trouvé abri sous le très grand velum, la chanteuse « met le feu » et l'incendie des âmes (le propre de la soul music?) n'est pas prêt de s'éteindre dans le cœur des spectateurs.

Xavier Prévost

Prochains week-ends thématiques au Paris Jazz Festival : Espagne le 9 juillet, Arménie le 16, musique afro-cubaine le 23, et rencontres classique & jazz le 30. Détails sur le site www.parisjazzfestival.fr

Toni Green sur la scène du Paris Jazz Festival au Parc Floral

Toni Green sur la scène du Paris Jazz Festival au Parc Floral

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3 juillet 2016 7 03 /07 /juillet /2016 15:52
@Jean-Marc Gelin

@Jean-Marc Gelin

Festival International de Jazz à Montreal ( 4/4)


Hier, dernière soirée à Montreal pour un programme light alors que le festival s’apprête le lendemain à recevoir un gigantesque concert en plein air de Jamie Cullum pour ce qui s’annonce être d’avance l’un des futur moment fort de cette 37ème édition.

Pour l’heure c’est dans le petit club de l’Astral que j’ai démarré la soirée avec la chanteuse de Sammois , Cyrille Aimé que j’avais eu le plaisir d’interviewer dans ces colonnes à l’occasion de la sortie de son album « Let’s get lost ». (http://www.lesdnj.com/2016/03/cyrille-aimee-let-s-get-lost.html)

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Cyrille Aimée : un petit oiseau sur sa branche
( L’Astral - 305 rue Ste Catherine Ouest)

La chanteuse tel un petit chaperon arrive sur scène toute de rouge vêtue et met en deux tempi trois mouvements le public dans sa poche en démarrant un scat d’enfer sur Live alone and like it. Il faut dire que la chanteuse de Sammois, pays de Django a trouvé la recette de charme pour conquérir le public de ce côté-ci de l’Atlantique portée par une voix impeccable et une formation composée de formidables musicien venus tout droit du jazz manouche. Des arrangements efficaces, des chansons simples, un sens du swing et un Adrien Moignard qui à la guitare acoustique joue terrible, emballe la salle avec ses impros et trouve avec Michael Valeanu l’autre guitariste, une excellente contrepartie. La chanteuse égrène son dernier album avec cette belle chanson d’Edith Piaf (T’es beau), une belle chanson hispanisante ( sa maman est de la république dominicaine), Estrellas y duendes, puis continue avec un arrangement intéressant de Well you need’nt.
Tel un oiseau sur sa branche, Cyrille Aimée vit une vie de chanteuse libre, avec une vraie personnalité musicale. Ce petit quelque chose qui tient de l’envol du rouge gorge ou de la fauvette. Cette apparente simplicité qui n’appartient qu’à elle et qui la fait s’envoler si gracieusement

Je sort de là bien sûr, ravi et enchanté de ce moment délicieux qui, l’espace de quelques concerts nous fait oublier les tristes nouvelles venues de France. Et je poursuis sur la trace d’un saxophoniste de légende.

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James Carter déchaîné !
(Gesùs 1200 rue de Bleury)

C’est un James Carter dans une forme éblouissante qui arrive sur la scène du Gésus avec sa formation ( Morgan trio) et ses deux acolytes , l’organiste Gérard Gibbs et Alex White à la batterie. L’ombre de Django plane sur cette soirée puisque le thème du programme du saxophoniste est « Django unchained », non pas en référence au film de Tarentino mais bien en hommage au guitariste de Sammois avec un revisitation du repertoire de Django qui démarre par un étonnant "Manoir de mes rêves" totalement transfiguré.

Le multi-saxophoniste de Detroit est visiblement heureux être là et pour l’heure s’il y a bien quelqu’un qui est déchainé c’est Carter, totalement hilare sur scène, jouant avec la puissance qu’on lui connaît, dansant sur les chorus de Gibbs, riant à gorge déployée bref faisant le show !

captation youtube d'un autre concert, mais qui donne bien le ton de la soirée

Les morceaux eux, en revanche s’enchaînent avec force explosion de sax et force est de reconnaître que le son de James Carter est ébouriffant. Dans la lignée des grands ténors américains. Dans celle des David Murray, Davis S. Ware ou Maceo Parker. De cette lignée au son rauque et ultra puissant qui me fait un peu penser à Earl Bostic, ce saxophoniste au son déchiré.
Spectaculaire mais un poil ( mais alors un bon gros poil) démonstratif.
On retient quand même la formidable énergie et la bonne humeur communicative de ce concert. Un Gérard Gibbs qui prend des airs de Jimmy Smith et un Alex White surevolté.
C’est sûr ce trio envoie du lourd !


Voilà, festival terminé pour moi.

Quand je regarde ce qui attend les heureux festivaliers qui restent encore toute la semaine et cette affiche incroyable qui fait de Montreal et de son festival, la vraie capitale mondiale du jazz, je me décide d’y prendre racine tous les ans.
Parce que franchement moi j' vous l’dis : on aurait tort de se priver…..

Des becs à vous tous,
et à bientôt pour de nouvelles aventures en jazz !

Jean-Marc Gelin

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2 juillet 2016 6 02 /07 /juillet /2016 17:03

Hier , jour férié à Montreal et de tout le Canada d’ailleurs. Fête nationale. Mais les frenchies bossent et j’ai donc accompagné mon ami, Alex Dutilh, producteur sur France Musique de l’émission Open Jazz dans les studios de Radio Canada où il recevait le directeur artistique du festival, André Menard. L’occasion si vous réécoutez l’émission d’entendre des extraits des concerts dont je vous parlais hier et notamment cette magnifique ouverture de celui de Chris Potter qui me laisse encore chancelant d’émotion.

L’émission est à réécouter ici…..

@Jean-Marc Gelin

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Petite pause déjeuner au Bouillon Blik, restaurant que je vous recommande au passage chaleureusement, au 1595 Boulevard St Laurent. Si je vous parlais du poulet de cornouailles, polenta, crevettes nordiques, bisque, poireau, champignons , asperges, pêche, romesco, amandes ce serait comme prendre un chorus sur My Favorite things !
Une tuerie !

Festival International de Jazz à Montréal ( 3/4)

Place au jazz avec mes billets en poche

Festival International de Jazz à Montréal ( 3/4)

Quand Susie Rie…..
J’ai commencé par un concert de la chanteuse Susie Arioli au Club Soda (1225 Bd Saint Laurent).
L’endroit est charmant. Entre Club de jazz et théâtre. Chaleureux. Un écrin pour la chanteuse qui se sentait visiblement comme à la maison, hyper relax et décontractée, plaisantant avec le public avec lequel elle a l’air de se sentir, comme en famille.
Une section rythmique ( p, cb, dm, g) + trois soufflants ( ts, tp, as) pour un concert de standards de jazz avec une orchestration très West Coast. On se croirait à San Francisco à un concert d’Anita O’ Day dans les années 50 avec un trompettiste à la Jack Sheldon.
Susie Arioli chante sans façons sans chichis mais avec une redoutable efficacité ( Mean to me, After you’e gone, Je bois (de Boris Vian), Lover boy etc…). Susie est une vraie show woman et
ça le fait carrément et je sors de là avec une pêche d’enfer pour aller retrouver le concert de Chick Corea.

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Chick forever….
Du Club Soda à la Maison Symphonique il n’y a qu’un pas que je franchis allègrement et entre les gouttes (de pluie).
Salle évidemment comble.
Chick Corea arrive sur scène accompagné de ses deux acolytes le colossal Christian Mc Bride avec sa contrebasse et le si raffiné Brian Blade avec ses cymbales.
Corea visiblement content d’être là sort de sa poche son smartphone et prend quelques photos de nous, le public. Attends Chick, si tu veux je viens te la dédicacer !
Et puis, pour s’accorder, il entreprend de faire chanter le public. Et là le premier chorus de Mc Bride est juste énorme. Et durant tout le concert, le contrebassiste va atteindre des sommets. C’est vrai que le pianiste s’accompagne souvent de contrebassistes très présent ( Avisai Cohen p.ex) et hier soir Mc bride prenait des airs et des sons de Mingus multipliant les chorus de très haute volée. Chick Corea est totalement libéré et aérien. Un morceau dédié à Miles et dont les harmonies reprennent celles de Someday My Prince will come suivi d’un Sophisticated Lady où c’est presque Corea et Blade qui se transforment en accompagnateur de Mc Bride. Pour conclure, Chick Corea nous offre un thème de Bud Powell qu’il avoue avoir écouté à l’âge de 5 ans, se désespérant alors de ne jamais pouvoir arriver à jouer aussi vite que lui.

Festival International de Jazz à Montréal ( 3/4)
Festival International de Jazz à Montréal ( 3/4)

Et puisque l’on parle de génie en herbe, j’en profite pour filer au concert du nouveau prodige du jazz venu tout droit d’Indonésie, le (très) jeune pianiste Joey Alexander.

Joey Alexander, ou le prodige incarné

J’étais en effet assez curieux de découvrir pour la première fois ce tout jeune pianiste de 13 ans dont je vous avais parlé dans ces colonnes (http://www.lesdnj.com/2015/05/joey-alexander-my-favourite-things.html). C’est assez drôle de penser que Joe Alexander, lorsqu’il n’est pas un pur génie du piano va, comme tous les enfants de son âge… l’école . Et il faut le savoir qu’il ne peut venir jouer que durant les vacances scolaires ( !!). Ma première émotion de la soirée fut donc de découvrir sa maman venue s’asseoir juste à côté de moi. La voir ainsi, s’installer dans le public avec une délicate discrétion pour se transformer ensuite en fan absolue de son génie de fiston, enregistrant tous ses morceaux avec soin, se levant presque à chaque chorus, s’émerveillant lorsque Joe s’adresse au public avec des mots choisis, bref cachant avec tact une immense fierté m’a franchement touché. Au deuxième morceau elle se tourne vers moi et me dis avec enthousiasme, là où on pourrait la croire blasée : « c’est My blues, un morceau que Joe a composé lui-même ».
Pour le reste c’était bien sur un concert hallucinant : Résolution ou Giant steps de Coltrane, Summertime, It might be Spring etc…..
Joe Alexander fait montre ( déjà !) de beaucoup de métier.
Sa science de l’improvisation se passe de mots. Elle s’accompagne d’une immense créativité dans chacun de ses chorus où il déploie une énergie décoiffante. Alors qu’au début du concert ( certainement le trac) il semblait attaquer doucement le clavier, la suite devint assez échevelée martelant ainsi le piano d’un jeu en blocks chords et mettant le feu dans le public. Pour ma part si je suis totalement bluffé par la très grande maturité de son jeu et de toutes les intentions qu’il met dans ses interventions, par son lyrisme autant que par les reliefs qu’il met dans son jeu j’ai été un peu frustré de ne pas l’entendre jouer de ballades. Du coup cela était un poil démonstratif (mais heureusement il ne s’Hiromise pas) tout en restant dans une intelligence du jeu exceptionnelle.

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Finalement il commence à se faire tard.

Je rentre à mon hôtel tout en prenant le temps d'absorber toutes les musiques qui me viennent des scènes de la rue.

Le coeur de Montreal bat et vibre.

Moi aussi

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1 juillet 2016 5 01 /07 /juillet /2016 14:47
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Décidément pendant le festival, cette ville s’est installée dans le jazz. C'est bien simple, il y en a partout autour de vous. Et pour tout le monde.

Pérégrinations du matin.

Au détour d'une déambulation qui m'amène à entrer dans un centre commercial, ce sont les enfants qui sont conviés à la fête pour une Petite Ecole du Jazz bien réjouissante.

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Un peu plus loin ce sont des fanfares ou des orchestres de rue qui prennent place dans le quartier, entre deux concerts et lui donne presque des airs de Nouvelle-Orléans.
De la musique non-stop....

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Conférence de presse à la Maison du festival où André Menard, le directeur du festival récompense du prix Bruce Lundvall le travail du producteur JIM WEST, fondateur du label canadien Just in Time ( Kenny Wheeler, Oliver Jones, Myriam Alter, Cecil Mc Lorin etc….). Petite séance sympa en toute intimité. Où André Menard se souvient de l'époque où Diana Krall franchissait pour la première fois les portes de ce festival, morte de trouille et d'une timidité confondante.

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Puis les choses se mirent à démarrer avec un premier concert en plein air d'un jeune trompettiste anglais que je ne connaissais pas, Matthew HALSALL. Approche très coltranienne ( jusqu'à intégrer une harpiste dans sa formation) pour une musique modale qui révèle ce jeune talent de la scène britannique. Ca ne décolle pas vraiment mais peu importe , il y a du monde et je surprend le jeune trompettiste certainement impressionné de se retrouver là, sortir son smartphone pour prendre une photo du public.

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Pas trop le temps de lésiner car je dois vite filer à la Maison Symphonique pour retrouver le célèbre Jazz at The Lincoln Center Orchestra dirigé par Wynton Marsalis. Le soyeux de cet orchestre, l'intelligence de la direction du trompettiste, la beauté des arrangements et l'excellence des solistes en font ( évidemment pourrait t-on dire...) l'un des plus beaux big band dans la plus tradition.

Le répértoire y est très Ellingtonien ( ça tombe bien il paraît qu'il y a des gens de la famille du Duke dans la salle). De quoi se lécher les babines avec un Braggin in Brass ( 1938) ou encore une belle compo de Strayhorn, Isfahan ( 1967) sur laquelle l'altiste, la montagne Sherman Irby se transforme en monument de pure tendresse et de douceur incarnée.

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Festival International de jazz à Montreal ( 2/4)

Je file ensuite pour ce qui va être pour moi le premier choc de ce festival, le concert énorme de CHRIS POTTER !!!

Avec Joe Martin à la contrebasse et Marcus Gillmore à la batterie, le saxophoniste de Chicago donna hier soir un concert à sa dimension : immense !

Si Chris Potter affirmait durant ce concert avoir été très largement influencé par Johny Hodges, c'est surtout et évidemment à Sonny Rollins que l'on pense en l'entendant.

Le continuateur du maître. Le fils prodige.

Un son gravé dans le roc, projeté avec une puissance et une énergie hallucinantes, un placement rythmique hors du commun. Avec Potter c'est 1000 variations en une seule phrase, passant du staccato au légato et du forte au piano dans un seul et même geste.

Et tout y passe. Un superbe thème de Police, un blues ultra rollinsien, un thème de Hodges

et au final une conclusion échevelé sur Ask me Now ( Thelonious Monk) que Potter avait entendu Joe Henderson jouer plusieurs fois. A coup sûr l'élève était là, sur le point de dépasser le maître.

Et s'il est des "saxophone colossus" , assurément la claque que nous a mis Chris Potter hier soir, montre qu'il fait partie de la clique des très très grands.

Festival International de jazz à Montreal ( 2/4)

Finalement pour me remettre de mes émotions je termine la soirée Place Heineken où tous les soirs après minuit la légende du folk song québecois, le guitariste Jordan Officer ( vous vous souvenez le disque avec Susie Arioli http://www.lesdnj.com/article-2126454.html ) donne à l'endroit des airs de bar country où les cow-boys viennent boire de la bière et jouer des coudes.

Totalement décalé dans le contexte mais tellement bon !

@Jean-Marc Gelin

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